Peut-on se représenter un singe plus étrange que le nasique ? C’est peu probable. Comme son nom l’indique, le nasique possède un appendice nasal extrêmement volumineux. Chez les vieux mâles, le nez peut atteindre des proportions véritablement extraordinaire, au point que lorsqu’il désire manger, il soit obligé de le relever de la main; celui des femelles est moins encombrant, mais néanmoins très saillant. Les nouveaux-nés eux-mêmes en possèdent déjà un remarquable.

Le nasique vit dans les forêts bases et les mangroves de Bornéo, où il est d’ailleurs peu abondant. Il passe sa vie parmi les frondaisons des arbres et se nourrit exclusivement de feuilles fraîches. Il est le seul des primates qui plongent dans l’eau des rivières et des estuaires du haut des arbres, parfois d’une hauteur de 15 à 17 mètres, pour nager d’une rive à l’autre. Il nage à merveille, tant en surface que sous l’eau, ce qu’il peut faire de 10 à 15 mètres, sans reprendre son souffle. C’est la une performance absolument unique pour un singe.

Dans les frondaisons, les nasiques déploient une agilité incroyable. Ils font des sauts dans le vide d’une hauteur de 8 mètres pour se rattraper à une branche inférieure d’une seule main. Cette vie ne se passe pas sans accident, et l’examen des squelettes révèle que 28% d’entre eux portent des fractures ressoudées aux membres.

Les nasiques vivent en troupe de 15 à 28 individus. Chaque bande est dominé par un mâle, qui veille à la sécurité de ses sujets. Le nasique vit difficilement en captivité, et quelques jardins zoologiques ont réussi à l’élever et le reproduire.